Luigi Cherubini - Medea

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Luigi Cherubini
Medea

Créé au Théâtre Feydeau à Paris (1797) sur un livret de François-Benoît Hoffman
Version italienne de Carlo Zangarini (1909) intégrant les récitatifs chantés de Franz Lachner (1855)

Direction musicale, Marko Letonja
Mise en scène, Christof Loy
Décors et costumes, Herbert Murauer
Lumières, Reinhard Traub
Expression corporelle, Thomas Wilhelm
Dramaturgie, Yvonne Gebauer

Creonte, Daniel Okulitch
Glauce, Grazia Doronzio
Giasone, Andrea Carè
Medea, Alexandra Deshorties
Neris, Sara Mingardo
Un capitaine de la garde royale, Alexander Milev
La Styliste, Johanna Rudström
Son assistante, Magdalena Risberg

Orchestre de la Suisse Romand

 

«Medea» met le feu au Grand Théâtre

Christof Loy dégage les racines humaines de l’opéra de Cherubini et Alexandra Deshorties en incendie le rôle-titre. Magnifique

C’était LE spectacle annoncé de cette saison. Celui qui avait été conçu dans une forme de symbiose entre le metteur en scène Christof Loy et la soprano Jennifer Larmore. A l’issue de Macbeth , en 2012, le projet était né dans un désir de collaboration exclusive. Medea a donc été conçue pour la célèbre chanteuse américaine. Et travaillée dans l’électricité d’une attente longuement mûrie.

Mais dix jours avant la première, Jennifer Larmore, qui envisageait cette prise de rôle comme un cadeau, attrape une vilaine trachéite. Impossible de chanter une partition si exigeante tant sur le plan vocal que théâtral et émotionnel.

Trouver en si peu de temps la perle rare, prête à endosser le personnage tout en imprimant sa personnalité sur un projet imaginé pour une autre, semblait compromis. La Canadienne Alexandra Deshorties a brillamment relevé le défi. Et sauvé une nouvelle production exemplaire.

Si on l’avait entendue à Aix-en-Provence en Fiordiligi puis en Donna Anna, son extraordinaire talent de tragédienne s’est développé depuis sur un terrain fertile. Aux prises avec la magicienne barbare, qu’elle a déjà interprétée au Festival de Glimmerglass il y a trois ans, la soprano a totalement intégré le destin monstrueux de l’héroïne hors norme.

Avec une science de jeu étonnante dans la diversité de ses expressions, la puissance rageuse de son chant, l’intensité de son incarnation scénique et la désolation de son être. Christof Loy a su s’appuyer sur cette incroyable intimité d’Alexandra Deshorties avec le rôle, rarement interprété depuis Callas. Et il a pu développer sans crainte sa propre vision du personnage.

Qui est cette sorcière fanatique, cette sauvage carnassière, doublement filicide, que la mythologie et les arts ont abondamment représentée et réinterprétée? La réponse de Loy est simple. Une femme trompée. Une mère répudiée. Poussée à un geste inconsidéré par le désespoir dont elle est victime, plus que par une monstruosité meurtrière.

Le livret de François-Benoît Hoffmann – dans sa version italienne de Carlo Zangarini – le raconte clairement en mots. Et la musique charnelle, incisive, orageuse et attendrie de Cherubini le souligne superbement en notes. Mais l’Antiquité grecque, avec ses Atrides et son imagerie assassine, a profondément marqué l’imaginaire médéen.

Christof Loy sort de ces rails historisants et impose une version bourgeoise. Ses protagonistes en tee-shirt, marcel et costume noir, et son chœur en tenue de soirée, formidablement articulé, parlent de l’être humain. Et de son inhumanité. Avec une Médée perdue, promenant son sac noir comme une âme en peine.

Un monumental espace boisé et encolonné fait barrage à l’action et l’oriente sournoisement dans des ouvertures latérales. Il y a peu de profondeur dans le décor d’Herbert Murauer, qui déroule une volée de marches plongeant dans l’orchestre. Mais une habile utilisation de volumes écrasants. Les musiciens, eux, sont enserrés à vue entre un proscenium à l’antique et une vaste ouverture de scène qui donne sur un paysage méditerranéen plus vivant que nature.

La pluie et l’orage, le crépuscule incendiaire et la chaleur de jours assommés de soleil accompagnent la musique illustrative de Cherubini. Les êtres empruntent le chemin en boucle dans une proximité frappante avec le public.

Ainsi le piège se referme lentement sur un meurtre annoncé, qui pourrait faire la une de faits divers: Médée, après avoir mis la table pour ses deux ados blasés, tiraillée entre sa haine et ses entrailles, trucidera ses enfants avec son couteau à pain. Tragédie du quotidien.

Cette interprétation particulière mais intelligente du mythe pourrait entraver la musique. Elle semble au contraire la libérer de ses contraintes. Car jusqu’au spectaculaire incendie final, le feu couve. Pour exploser en une catharsis sonore et visuelle. Il faut attendre le deuxième acte pour que Marko Letonja et l’OSR trouvent leurs marques. Un peu molles dans l’ouverture, les sonorités s’aiguisent progressivement et la tension gagne en puissance de page en page.

Le chœur tranchant commente et accuse haineusement. Et la Neris de Sara Mingardo rougeoie brillamment aux côtés de Médée affolée, du Creonte cendré de Daniel Okulitch, de la Glauce éclatante de Grazia Doronzio, du Giasone argenté d’Andrea Carè et des deuxièmes rôles de belle tenue. Ce formidable plateau vocal touche à un équilibre sans taches, dans un ouvrage réputé difficile à distribuer. Une production de grande classe.

Grand Théâtre de Genève

Le Grand Théâtre de Genève est à la fois un lieu et une institution. Le lieu ? Un auguste bâtiment qui trône sur la Place de Neuve depuis 1879. Sa salle de 1500 places, rénovée en 1962 suite à un incendie, offre une remarquable qualité acoustique et visuelle aux spectateurs. L'institution ? C'est un vaste appareil scénique, la plus grande structure de production de Suisse romande, offrant chaque année une saison d'opéras et de récitals de niveau international. Le Ballet du Grand Théâtre ajoute à chaque saison deux à trois productions chorégraphiques que la scène internationale accueille également lors des nombreuses tournées de la compagnie à l'étranger.

Le Théâtre de Rosimond

Le Théâtre de Rosimond est l’ancêtre du Grand Théâtre de Genève. Du nom de l’entrepreneur de spectacles lyonnais Argus Rosimond qui en avait la gérance, il fut construit en 1766, en bois, de l’autre côté de la Place Neuve, à l’angle du parc des Bastions et de l’actuelle rue de la Croix-Rouge, dans le but de distraire les garnisons de soldats étrangers venues maintenir l’ordre dans la cité. Il comportait trois étages de loges avec un foyer au rez-de-chaussée et pouvait recevoir huit cents spectateurs. Son éclairage était fourni par un lustre de chandelles de suif, sous lequel avait été placé un plateau de verre pour recevoir les gouttelettes pleuvant sur les spectateurs. Malheureusement, aucune image de l'intérieur comme de l'extérieur n’a été gardée. Deux ans plus tard, un incendie probablement intentionnel dévasta les tréteaux du Théâtre de Rosimond. Au cours de son existence éphémère, on y joua la comédie et l’opéra-comique. Le compositeur liégeois André-Ernest-Modeste Grétry y donna une oeuvre nouvelle de son cru, Isabelle et Gertrude.

Le Théâtre de Neuve

C’est en 1783 que ce bâtiment initial fut remplacé par le Théâtre de Neuve, réalisé par l'architecte Pierre-David Matthey. Il fut construit en pierre cette fois-ci. Cet édifice élégant pouvait accueillir un millier de spectateurs sur un parterre et trois étages de balcons. Cependant, la scène était exiguë et sans dégagement, et la fosse ne pouvait contenir qu’une trentaine de musiciens. A l’aube de la Révolution française, alors qu’une vague d’agitation politique parcourait Genève, cette nouvelle salle avait toujours pour fonction d’accueillir et de divertir les officiers étrangers venus en renfort et elle était désormais destinée en priorité aux actionnaires qui la finançaient. Par conséquent, la majorité de la population genevoise n’y avait pas accès. Le Théâtre de Neuve n’occupa la place que le temps d’un petit siècle. En effet, en raison des troubles révolutionnaires, le théâtre dut fermer ses portes à plusieurs reprises. Il devint même le lieu de réunion d’un club révolutionnaire, pour être par la suite transformé en filature de coton. Finalement, en octobre 1797, un arrêt y interdit tout spectacle. Il faudra attendre l’annexion de Genève par la France en avril 1798 pour que le théâtre soit réouvert. Durant les quinze années d’occupation, il accueille des troupes d’artistes français. A la Restauration, en 1813, les comédiens quittent Genève avec l’armée française. Le théâtre réouvre une nouvelle fois en 1817 et retrouve sa vocation primitive en s’ouvrant plus largement à la population. On y joua tout le répertoire du siècle, Rossini et Donizetti, Auber et Meyerbeer, Beethoven, Weber et même Wagner, dont les Genevois purent découvrir le Tannhäuser bien avant les Parisiens. Nonobstant quelques vedettes qui y brillèrent parfois, la plupart du temps le niveau était très moyen, mêlant comédies, vaudevilles, opérettes et opéras plus ambitieux. La tendance générale restait orientée vers le répertoire français, léger de préférence. Et si Faust y fut un succès constant, La Fille de Madame Angot en fut un bien plus grand...

Le Grand Théâtre 1879-1951

Le premier Théâtre de Neuve fut démoli en 1880, après une longue activité ininterrompue, pour laisser la place à un nouveau Théâtre correspondant mieux à des exigences accrues et à l’augmentation de la population. Dès 1862, le Conseil municipal jugea le Théâtre de Neuve trop petit et trop modeste par rapport à l’importance et au prestige grandissant de la ville de Genève. Un concours fut donc lancé en 1870 et les architectes Emile Reverdin et Gaspard André décrochèrent le projet. Le financement du nouveau bâtiment fut rendu possible par la générosité du Duc Charles de Brunswick : à sa mort, il légua sa fortune à la Ville de Genève en 1873. On préleva 1’200’000 francs afin d’édifier le futur haut lieu de la culture lyrique genevoise. La construction du nouveau théâtre, sur un terrain de 3000 m2 fourni par l’Etat de Genève, fut votée en 1874, suivant les plans de l’architecte Jacques-Elisée Goss.

Le bâtiment est construit sur d’anciens fossés de fortifications. La première pierre du Grand Théâtre fut posée en 1875. Quant à son inauguration officielle, elle eu lieu en octobre 1879, avec la représentation d’un opéra de Rossini, Guillaume Tell, suivi d’une saison particulièrement brillante. Situé entre le Musée Rath et le Conservatoire de musique, le bâtiment était classé parmi les dix meilleurs théâtres européens, peu après le récent Palais Garnier de Paris, dont il s’inspirait d’ailleurs par son style Second Empire. Les façades du bâtiment sont construites entièrement en pierre de taille, les soubassements en roche du Jura et le reste de la construction en grès et en molasse. Sur la façade principale, les huit grandes colonnes sont en roche du Jura et les six petites en granit rouge provenant d’un torrent de l'Oberland bernois. La façade principale de l'édifice présentait – et présente toujours – maintes sculptures et moulures qui lui confèrent son aspect monumental. Précédé d'un vaste perron, l'avant-corps central est rythmé par de grandes statues de marbre, représentant (de gauche à droite) la Tragédie, la Danse, la Musique et la Comédie. A l'étage, des colonnes doubles séparent les trois baies à balcons du grand foyer. Au-dessus se dresse un fronton portant les armoiries de Genève, couronnées d'une allégorie du Génie des arts et flanquées de deux groupes de figures sculptées. Sous l'entablement, huit bustes ornent la façade principale et les retours sur les deux façades latérales. Il s'agit des portraits de grands compositeurs Rossini, Boieldieu, Beethoven, Meyerbeer, Weber, Mozart et Donizetti, ainsi que du célèbre écrivain genevois J.J. Rousseau, également compositeur à ses heures.

En pénétrant dans le vestibule d'entrée, on rencontrait en premier lieu les guichets et, sur la droite, le café du Théâtre; on entrait ensuite dans le hall donnant accès à la salle, aujourd'hui rénové dans son dallage d'origine en marbre polychrome. Les murs des deux volées d'escalier conduisant aux foyers et aux loges étaient décorés de six grandes peintures représentant la musique guerrière, champêtre, religieuse, légère, orphique et bachique, œuvre de Léon Gaud. Ces panneaux, qui étaient d'une belle tenue académique, alternaient avec des médaillons arborant les portraits de compositeurs illustres. Tous les éléments décoratifs de l'avant-foyer (encadrements des portes menant aux loges, voussures du plafond) ont disparu dans l'incendie de 1951. A l'étage, en face de l'accès à la salle de spectacle, trois portes ouvrent sur le grand foyer dont la vue se prolonge sur la place Neuve à travers trois baies vitrées. Le grand foyer avec, à sa droite, le petit foyer et, à sa gauche, le petit salon forment le bel étage de la façade principale. Les nombreux grands miroirs qui animent les parois de ces trois salles en enfilade, offrent un subtil jeu de perspectives visuelles. Le foyer voulait rappeler, par sa splendeur, la célèbre galerie d'Apollon du Louvre. Dans le petit foyer, le plafond est dû au peintre Léon Gaud. De nombreux artistes – peintres et sculpteurs – furent sollicités pour enrichir d'ornements éclectiques tant l'extérieur que l'intérieur du bâtiment.

La décoration de la salle était somptueuse, l'or rehaussant les tons clairs. Quinze médaillons placés dans la voussure, autour de la coupole centrale à laquelle était suspendu un imposant lustre, représentaient neuf artistes de théâtre et six chanteurs. Ces médaillons, tout comme le décor pictural aux motifs allégoriques (la Musique, la Déclamation et la Danse) qu'ils entouraient, étaient l'oeuvre d'un peintre académique parisien, Pierre-Nicolas Brisset. Ornementation somptueuse pour ce bâtiment dont les installations techniques étaient à la pointe du progrès pour l'époque. Le rideau de scène fonctionnait grâce à la pression hydraulique provenant de l'usine des Forces Motrices. De plus, des travaux d'électrification furent exécutés entre 1905 et 1913. Ils permirent notamment l’installation d’un rideau de fer actionné par un treuil électrique et la substitution de l'électricité au gaz pour l’éclairage des spectacle.

Incendie - Reconstruction 1951-1962

Le 1er mai 1951 à 12h08, lors de la préparation d'un tableau du troisième acte de La Walkyrie, un violent incendie éclata, détruisant la scène et toute sa machinerie, les installations mécaniques et électriques, cintres, grils, passerelles. Le rideau de fer s'effondra et le sinistre gagna la salle - du parterre à la troisième galerie -, la grande peinture décorative du plafond et toutes celles des médaillons et des cartouches du plafond d'avant-scène. Il restera, de la partie non-sinistrée du théâtre, le foyer, l'avant-foyer, l'entrée principale ainsi que les façades jusqu'au bâtiment de scène compris. Le théâtre dut fermer ses portes pour une décennie entière, période pendant laquelle les spectacles furent transférés à la salle du Grand Casino ou Kursaal.

L’incendie qui dévasta le Grand Théâtre fournit l’occasion de revoir complètement la structure de la salle et l'équipement de la scène. Il fallut toutefois du temps pour arrêter un projet et réunir un consensus autour de son financement. La Ville de Genève engagea de nombreuses études en vue de la reconstruction. Celle-ci fut entreprise de 1958 à 1962 par le Genevois Charles Schapfer et le Milanais Marcello Zavelani-Rossi, avec, pour la décoration de la salle, l'artiste suisse d’origine polonaise Jacek Stryjenski. Après la mort prématurée de celui-ci, l'aménagement de la nouvelle salle sera confié aux architectes Albert Cingria et Georges Tamarasco. L'impressionnant plafond prolongé à la verticale par le rideau de feu, conçu par Stryjenski, se compose de tôles d'aluminium rehaussées de feuilles d'or et d'argent, elles-mêmes percées d'un millier d'orifices lumineux ornés de verre de Murano qui créent l'illusion de la voie lactée. Trois saillies insérées dans ce plafond permettent de loger des sources d'éclairage, soit pour l'illumination du métal décoré, soit pour y disposer des projecteurs d'avant-scène. La réouverture des portes eut lieu en décembre 1962, avec la version française du Don Carlos de Verdi.

Le Grand Théâtre 1962 - Aujourd'hui

A l’inauguration du nouveau théâtre, on découvre une salle majestueuse, entièrement reconçue et une mécanique de scène équipée des technologies les plus avancées de l’époque. Depuis sa résurrection, de prestigieux directeurs se sont succédé à la tête de la scène de Neuve : dans l’ordre, Marcel Lamy (1962 - 1965), Herbert Graf (1965 - 1973), Jean-Claude Riber (1973 - 1980), Hugues Gall (1980 - 1995), Renée Auphan (1995 - 2001) et Jean-Marie Blanchard (2001 - 2009). C'est Tobias Richter qui reprend cette fonction dès la saison 2009-2010.

Dans sa version initiale de 1879, la salle du Grand Théâtre de Genève avait été construite à l'italienne, les loges et les balcons sur plusieurs étages occupaient les trois côtés de la salle en forme de fer à cheval. La salle rénovée en 1962, plus proche désormais d'une forme à l'allemande, c’est-à-dire carrée (précédemment ovale), contient 1488 places - 593 au parterre, 199 au balcon, 161 à la galerie et 535 à l'amphithéâtre. Cette configuration spatiale permet à chacun des spectateurs, où qu'il soit assis, d'avoir une visibilité intégrale de la scène.

Technologies anciennes et modernes

Pendant la saison 1997-1998, un double chantier est mis en route. Le premier devenu primordial et urgent après 10 ans d'études (celui du remplacement de la mécanique de scène) et le second touchant aux travaux de réfection dans l'espace public. L'essentiel des travaux réalisé dans la cage de scène, c'est-à-dire entre le plancher et la toiture, est invisible des spectateurs. Le chantier aura nécessité l'intervention de soixante entreprises et de six cents ouvriers. Si rien n'a changé dans la structure des murs, les possibilités du bâtiment auront été exploitées au maximum. L'entreprise allemande retenue pour la réalisation de ces travaux, Mannesmann Rexroth, comptait parmi ses précédents chantiers l'Opéra de Göteborg et la machinerie du Festival de Salzbourg, auxquels s'ajoute désormais, comme référence, le Grand Théâtre de Genève.

La scène

C’est en 1987 que fut lancé le projet de remplacement de la machinerie. Le crédit fut voté en 1994 et la première étape des travaux réalisée en 1997-1998. Ces travaux étaient nécessaires à la sécurité et à la modernisation des installations. La mécanique de scène est constituée de deux infrastructures principales qui lui donnent sa force : la machinerie du dessus (cintre) et la machinerie du dessous de scène. Le Grand Théâtre était équipé depuis 1962 d’un système hydraulique de basse pression, révolutionnaire pour l’époque mais devenu obsolète.

La machinerie du haut - cintre

Afin d'assurer une efficacité et une sécurité maximales, la machinerie de scène ou cintre a subi une métamorphose complète et a été entièrement informatisée. Les travaux comprenaient le renforcement de la structure afin de mieux supporter les nouvelles charges, l'installation d'une centaine de treuils hydrauliques, le renforcement et l'élargissement des passerelles existantes surplombant la scène (passées de 90cm à 190cm). Toutes les équipes et les herses sont pendues à partir de la toiture. Dans le jargon du théâtre, les « équipes » sont les 52 perches de 20m de long fixées aux décors, qui se soulèvent ou se baissent face au public. Leur capacité de charge est passée de 500kg par décor à 1000kg. Elles sont désormais synchronisées tandis que leur vitesse est programmable pour la réalisation des effets.

La salle et les espaces publics

La Fondation Hans Wilsdorf a, quant à elle, offert 2,8 millions pour la réfection du hall d'entrée et de la salle. Le premier a retrouvé son magnifique sol originel en marbre polychrome qui était caché par une moquette rouge. Quant aux nouveaux sièges de la salle avec leurs dossiers en bois, ils ont été recouverts de velours rouge et placés sur du parquet. Le rideau de fer et le plafond ont été nettoyés et désamiantés, et le plancher de scène entièrement refait. La fosse d'orchestre a été rénovée et peut à présent s'élever ou s'abaisser jusqu'à 6m50. La Fondation Hans Wilsdorf a également financé, en 2007, le nouveau système de surtitrage bilingue français-anglais à écran LED qui permet de voir les surtitres de toutes les places.

Le plateau et les dessous

Le plateau principal du Grand Théâtre comprend une scène centrale constituée de six ponts, d'un poids respectif de 17 tonnes, montés sur des vérins hydrauliques qui les rendent mobiles. Ils peuvent être déplacés à la verticale, individuellement et selon les besoins des mises en scènes, de moins 8,67 m à plus 2 m. D’autre part, une scène dorsale autoporteuse, actionnée grâce à un moteur électrique, peut avancer horizontalement en glissant sur des rails et se substituer à la scène principale lorsque celle-ci s'abaisse. Le cadre de scène possède des dimensions variables. La fosse d'orchestre peut accueillir jusqu'à cent musiciens. Mécanisée, elle se compose de trois ponts mobiles permettant de placer l'orchestre sur différents niveaux, jusqu'au prolongement du plateau, le «proscenium» (ou fosse comblée).
Enfin, un lift à toile et châssis sert à la manutention et au stockage de matériel destiné à la scène. Or la gestion de ces vastes éléments mis en mouvement par un système électro-hydraulique n’est plus automatisée. Elle nécessite donc un personnel nombreux pour garantir une sécurité minimum.

Ainsi la dernière étape de modernisation, entreprise en 2006, a consisté à automatiser l’ensemble des dessous et à en confier la gestion à un nouveau système électro-hydraulique piloté par informatique. Ils peuvent être actionnés solidairement et synchronisés avec la machinerie du haut. Outre l’assurance d’une parfaite sécurité dans les différentes manoeuvres, cet outil scénique intégralement rénové saura répondre aux exigences les plus hautes de l’art de la scénographie.

Aux côtés d'entreprises extérieures, le personnel technique du Grand Théâtre participa activement au projet. Nos mécaniciens démontèrent et remontèrent une grande partie des organes de la mécanique de scène, notre service électrique refit toute l'installation des éclairages et tout le câblage de la nouvelle installation, et enfin le service Son et Vidéo remit à neuf tout son équipement dans les dessous de scène

Cette lourde rénovation a été financée par la Ville de Genève et l'Association des communes genevoises à hauteur de 20 millions de francs suisses. Ces nouvelles installations font plus que jamais du Grand Théâtre une salle de spectacle à la pointe des techniques de scène, l'une des plus performantes d'Europe.

  • Grand Théâtre de Genève 11, boulevard du Théâtre - CP 5126 1211 Genève 11 Suisse
  • web

Marko Letonja

À la fois directeur musical de l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg et directeur musical et artistique du Tasmanian Symphony Orchestra depuis 2012, le chef slovène a commencé par étudier le piano à l’Académie de musique de Ljubljana avant d’y aborder la direction d’orchestre. Il est alors l’élève d’Anton Nanut et suit, en parallèle, les cours de direction d’Otmar Suitner à la Akademie für Musik und darstellende Kunst de Vienne, où il obtient ses diplômes en 1989. Entre 1991 et 2003, il est directeur musical de l’Orchestre philharmonique de Slovénie. Rapidement, il est très demandé sur la scène internationale et collabore avec des solistes comme Mstislav Rostropovitch, Vadim Repin ou Thomas Quasthoff. Du Grand Théâtre de Genève au Teatro alla Scala de Milan (où il a notamment dirigé, en janvier 2012, de remarquables Contes d’Hoffmann), il oeuvre dans les plus prestigieuses maisons d’opéra. En janvier 2013, Marko Letonja a fait ses débuts au Staatsoper de Vienne dans La Dame de Pique puis y a notamment dirigé Les Contes d’Hoffmann (mai 2014). En août 2003, il est nommé chef permanent et directeur musical de l’Orchestre symphonique et de l’Opéra de Bâle : il y reste jusqu’en 2006, dirigeant de nouvelles productions de Tannhäuser, La Traviata, Der Freischütz, et Tristan und Isolde, parmi d’autres. Ensuite, il est nommé, en 2008, chef principal invité de l’Orchestra Victoria de Melbourne. Il a dirigé l’OPS pour la première fois en décembre 2006 (oeuvres de Moussorgski et Chostakovitch). On se souvient aussi de ses brillantes prestations, dans la fosse de l’Opéra national du Rhin dans Götterdämmerung (2011), Der ferne Klang (2012), De la maison des morts (2013) ou encore Der Fliegende Holländer (2014). Dans sa discographie, mentionnons un opus dédié à Ross Harris (Naxos, 2012) gravé avec le Auckland Philharmonia Orchestra ou la Symphonie n° 7 de Weingartner (CPO, 2013) couronnant une remarquable intégrale symphonique dédiée au compositeur enregistrée avec le Sinfonieorcheser Basel.

  • Chef d'orchestre
  • web

Christof Loy

Très vite, il se tourne vers le théâtre musical, plus particulièrement vers l’opéra à l’italienne (les trois compositeurs qu’il admirer le plus sont Monteverdi, Mozart et Verdi). Il se rend ensuite à Munich où il suit des cours de philosophie, d’histoire de l’art et de philologie de la langue italienne tout en exploitant chaque occasion d’assister de l’intérieur au travail théâtral en acceptant divers stages d’assistant metteur en scène.
Ses diplômes en poche, il trouve rapidement le chemin des grandes scènes et propose ses premières réalisations sur les scènes des théâtres de Stuttgart. Il monte ainsi une Flûte enchantée à l’Opéra de la ville, tout en manifestant encore un intérêt marqué pour le théâtre parlé avec des réalisations remarquées du Triomphe de l’amour de Marivaux et Phèdre de Racine. Sa mise en scène de la pièce de Marivaux crée la sensation ; elle est sélectionnée par un jury professionnel comme une des meilleures réalisations théâtrales de l’année et le spectacle sera, à ce titre, invité au prestigieux Festival de Berlin où sont chaque année rassemblés les spectacles les plus marquants du moment. Ensuite, il enchaîne les productions sur un rythme soutenu, avec un intérêt toujours plus marqué pour l’opéra. Glyndebourne l’engage pour Iphigénie en Tauride de Gluck, Bruxelles pour Les Noces de Figaro, Eugène Onéguine, Le Chevalier à la Rose ou encore L’Enlèvement au sérail. Ensuite il devient un des invités de prédilection de Tobias Richter lorsque celui-ci dirige l’Opéra du Rhin de Düsseldorf/Duisbourg ; il y monte un nombre tel de spectacles que dans le courant de la saison 2008/2009, un véritable festival est mis sur pied comprenant près d’une dizaine de ses productions !
Les grandes scènes d’Allemagne et d’ailleurs ne se font pas attendre. Munich lui confie deux opéras de Donizetti montés pour Edita Gruberova (Roberto Devereux et Lucrezia Borgia), des réalisations qui ont eu les honneurs d’une captation en DVD parue chez Universal. Après le succès d’Ariadne à Naxos, le Covent Garden de Londres le réinvite pour Lucia de Lammermoor, Lulu et, l’automne dernier, Tristan und Isolde. Le festival de Salzbourg voit son Armida de Haydn et sa Theodora de Haendel tandis que le Theater an der Wien de Vienne s’assure ses services pour un nouveau Giulio Cesare de Haendel et le rare Intermezzo de Richard Strauss. Genève s’est mis sur les rangs et annonce pour la saison prochaine deux de ses productions consacrées à La Veuve Joyeuse de Lehár et aux Vêpres Siciliennes de Verdi.

Les recettes du succès
Il est difficile de définir un style immédiatement reconnaissable dans le travail scénique de Christof Loy. A ce titre, il n’est pas comparable à celui d’un Franco Zeffirelli, par exemple, dont les spectacles obéissent à des impératifs esthétiques immédiatement reconnaissables. En refusant la facilité de la collaboration avec un décorateur unique, le metteur en scène allemand veille à conserver une liberté d’approche qui lui permet de trouver pour chaque nouveau spectacle la clef d’interprétation qui lui semble convenir. Ainsi a-t-il monté un Enlèvement au Sérail à Bruxelles et Francfort sans costumes orientalisants et dans un espace quasiment nu pour inviter le spectateur à concentrer son attention sur le conflit entre deux conceptions de l’amour qui ne se réduisent pas à la confrontation de deux identités culturelles opposées. Dans Lucrezia Borgia, l’opéra de Donizetti monté à Munich pour Edita Gruberova, le procédé est encore plus radical puisque toute référence à la Renaissance italienne disparaît : le vaste plateau du théâtre est totalement nu, alors que les costumes des acteurs, modernes et même franchement laids, dévoilent non l’état social des protagonistes mais leur degré de maturité psychologique. Par contre, son Turc en Italie hambourgeois accumule les références humoristiques aux gags éculés de la commedia dell’arte : en fait, cette vision modernisée d’une Italie de fantaisie où règne l’humour le plus déjanté dissimule à peine une critique acerbe d’un ordre social foncièrement injuste.

Provocation
Christof Loy aime à répéter que la partition, plus que le cadre historique choisi par le musicien ou le librettiste, doit donner le ton à ses mises en scène. Chacun sait en effet que, lors de la composition d’un nouvel ouvrage, le choix d’un lieu ou d’une époque est souvent influencé par des conditions externes qui n’ont rien à voir avec les préoccupations du moment de ses auteurs. La censure, ou les usages du temps, imposent des choix qui vont souvent à l’encontre de leurs vœux : il suffit de rappeler dans ce contexte les tours de passe-passe auxquels à dû consentir Verdi dans Un bal masqué ou Stiffelio pour ne pas mécontenter une censure omniprésente ! Dans une mise en scène moderne, il s’agit donc de retrouver impérativement dans la musique ce qu’a vraiment voulu l’auteur, quitte à proposer la vision d’un univers théâtral qui n’a rien à voir en apparence avec les didascalies du livret.
Dans une querelle résurgente à toutes les époques, le public aime à critiquer ce qu’il voit dans les théâtres au nom d’une sacro-sainte tradition. Mais quelle est-elle vraiment ? Et qu’est-ce qui la justifie ? Les canons esthétiques qui prévalent en certaines époques dans l’approche de tel ou tel compositeur ont avant tout le défaut de rendre confortables, par un sentiment de déjà-vu, des situations dramatiques qui devraient au contraire soulever l’indignation. Attendre systématiquement d’une représentation de La Traviata ou de Madame Butterfly qu’elle se joue dans de beaux décors qui recomposent sous nos yeux les charmes du Paris argenté du XIXe siècle ou d’un bord de mer japonais enrichi de cerisiers en fleurs, c’est courir le risque d’oublier l’insupportable misère affective de leurs héroïnes maintenues dans la servitude par le caprice d’une classe argentée totalement amorale. La mise en scène moderne d’un ouvrage du passé implique donc l’obligation, pour son auteur, de faire ressortir les conflits latents qui y sont exposés, même s’il lui faut choquer pour atteindre son but. Car s’il y a provocation à l’opéra, elle est d’abord à rechercher du côté du sujet, non du metteur en scène… Les spectaculaires échecs de Traviata et de Butterfly lors de leurs première respectives à Venise et Milan sont là pour nous le rappeler...

  • Metteur en scène
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